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Est-ce à un voyage à la surface du globe et dans le temps que nous convie Philippe Héroux, ou à la visite d'une bibliothèque dont les livres se seraient transmutés en tableaux ? C'est sans doute les deux à la fois.
Cet artiste niçois, d'origine parisienne, présente un ensemble de peintures et de dessins inspirés par des cartes arrachées à de vieux atlas scolaires de la période de l'entre deux guerres. Comme pour mieux mettre l'accent sur le fait que ses tableaux sont essentiellement construits pour libérer du récit, Philippe Héroux les a nommés d'après des oeuvres littéraires bien connues. De plus, il les a traité dans un style délibéremment emprunté à la bande dessinée. "Les amateurs de BD y repéreront certainement des réminiscences d'albums de Tardi, Hergé ou Hugo Pratt", confie le peintre.

Les quatre éléments  

La démarche que l'artiste s'est assignée est des plus simple: basée sur la première association d'idées provoquée par l'examen d'une carte de géographie, qui sera elle-même intégrée à l'oeuvre, la surface à peindre tente alors de se remplir de signes figuratifs ou abstraits convergeant vers l'idée première. Mais, ajoute Philippe Héroux, "toujours de nombreux accidents de parcours ponctuent la réalisation du tableau et déroutent le projet initial vers une grande part d'inconnu. Paradoxalement, la carte, outil de repérage par excellence, est ici utilisée comme source d'égarement, elle constitue en fait une aide précieuse pour ne jamais arriver à l'endroit vers lequel je me dirige".
Dans la plupart de ses peintures et dessins, la mémoire involontaire, mais aussi la culture de l'artiste semblent avoir été fortement mises à contribution. Ainsi, dans le tableau intitulé "Moisson rouge" d'après le roman de Dashiell Hammet, une carte d'Allemagne s'est trouvée librement associée dans son esprit à un de ses très vieux souvenirs, celui d'un déjeuner à Bournemouth, chez un peintre anglais bien connu Outre-Manche, Samuel Rabin.
Au cours de ce repas, ce dernier, ancien pilote de bombardier dans la RAF durant la seconde guerre mondiale, avait évoqué sa première mission sur Berlin et les sentiments qu'elle lui avait inspirés. Le tableau de Philippe Héroux nous montre bien un bombardement et les ruines d'une ville en flammes, mais l'ensemble est augmenté de divers symboles dont les mouches, et parait ainsi pointer vers autre chose qu'une simple illustration des désastres de la guerre.
Il est à noter que cet ensemble d'oeuvres travaille sur les quatre éléments. Ces tableaux et dessins pourraient alors bien être les éléments constitutifs d'une réflexion visuelle sur l'antique problème du multiple et de l'un, et sur cette force supérieure, plus ou moins divine, qui est censée organiser le monde l'intérieur.

Article paru en Mai 2002 dans le journal L'Est Républicain

 

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